La Grande Récré est une enseigne de MAGASINS, c’est compris ?

Je me rends sur le site de La Grande Récré afin de trouver des jouets à offrir pour Noël. Premier contact avec cette enseigne que je ne connais pas : ce layer géant.

La Grande Récré : layer d'accueil

Personnellement, il ne me donne pas envie d’aller voir plus loin. Il est rempli d’informations qui ne m’intéressent pas à ce stade de ma « visite » – peut-on vraiment parler de visite alors que je n’ai pas encore atteint la page d’accueil ? Des pictos, des photos, du texte à n’en plus finir… La Grande Récré préfère apparemment les visiteurs-lecteurs aux visiteurs-acheteurs.

Je creuse un peu pour comprendre comment les concepteurs du site en sont arrivés là. Pour découvrir ce qui les a motivés à créer cette fenêtre, il me suffit de lire le texte et – surtout – de compter le nombre d’occurrences du mot magasin : sauf erreur de ma part il est inscrit 7 fois sur ce layer !

La Grande Récré : 7 occurrences du mot magasin !

La Grande Récré est une enseigne de MAGASINS, c’est compris ?

Bref. J’entre mon code postal, et là… Il ne se passe rien.
J’attends : toujours rien.
Je m’ennuie, je clique en dehors du layer en espérant le faire disparaître : rien non plus.
Je clique à nouveau dans le champ de saisie : le code postal que j’ai tapé disparaît. Je l’entre une deuxième fois, j’essaie de valider avec la touche Enter, et… rien du tout.

La Grande Récré : code postal saisi

Je finis par comprendre : il faut cliquer sur le menu déroulant de droite après avoir saisi son code postal ! Ce menu déroulant présente donc deux erreurs :
• il est grisé en permanence, il n’est donc pas possible de comprendre qu’il est actif (problème d’affordance) ;
• il ne change pas d’état lorsque l’on saisit un code postal (aucun retour ne permet au visiteur de se rendre compte qu’il faut désormais interagir avec lui).

Oui, enfin ça, c’est quand le code postal que je saisis correspond à un magasin. Dans le cas contraire (mon cas, en l’occurrence), le menu déroulant continue d’indiquer « Sélectionner s’il vous plait » (joli libellé) et il ne se passe rien. En d’autres termes, si je ne trouve pas un code postal qui corresponde à un magasin, impossible de rentrer sur le site ! (*)

La Grande Récré : code postal saisi non reconnu

J’entre un code postal que je suppose valide (je ne prends pas de risque, je choisis 75000), je sélectionne le premier magasin de la liste et j’appuie sur le bouton. Après le rechargement de l’intégralité de la page (les mobiles apprécieront), l’écran suivant apparaît :

La Grande Récré : masque blanc

Le site est caché derrière un calque blanc légèrement transparent, et un bouton (?!) m’indique que « [mon] magasin s’affiche ici », c’est-à-dire dans une zone masquée par le calque blanc. Deux choses :
• Je viens de le choisir dans une liste déroulante, mon magasin, est-il vraiment nécessaire de me l’indiquer à nouveau ?
• Quand bien même cette information serait pertinente, est-ce vraiment un bon moyen de procéder ?

Au bout de quelques secondes (ou au clic), le voile blanc disparaît et je peux enfin accéder au site internet. Victoire !

Pour clore cette note, voici la page d’accueil du site :

La Grande Récré - page d'accueil du site

La copie d’écran a été faite mercredi 18 décembre. Le premier message visible sur la page, hors header, est le suivant : « Livraison non garantie pour le 24 décembre ». Il fallait oser ! À l’heure où tous les concurrents affichent des indications pour recevoir ses achats avant Noël, La Grande Récré préfère jouer la « sécurité ». Pour être honnête, j’ai rarement vu une chose pareille. En ce qui me concerne, j’ai passé commande chez Amazon et j’ai reçu mon colis le vendredi.

Je ne sais pas si un jour les enseignes « brick & mortar » prendront la mesure du retard qu’elles ont.

 

(*) Je suis mauvaise langue, il existe un moyen détourné de rentrer sur le site : il suffit d’appuyer sur le bouton Entrer dans votre magasin (choix de picto très intéressant, au passage) après avoir saisi un code postal. Sauf que…
• il n’y a aucun moyen de le savoir ;
• à la prochaine visite sur le site, le layer réapparaîtra.
Attention toutefois à ce que le code postal soit valide. Dans le cas contraire, le message d’erreur « Pas de magasin disponible pour ce code postal » s’affiche et le visiteur est à nouveau bloqué.

La Grande Récré : message d'erreur

Il est également possible que le layer réapparaisse sous une forme… différente. Ce doit être le traitement réservé aux gens qui testent un peu n’importe quoi.

La Grande Récré : layer en vrac

Cdiscount et ses dark patterns

Je me rends aujourd’hui sur le site 24joursdeweb pour consulter l’article de Christelle Mozzati Les dark patterns en design d’interface, article très intéressant et bien illustré dont je recommande la lecture (pas la peine d’aller plus loin sans l’avoir lu !) J’ai été particulièrement surpris de lire que « CDiscount […] ne procède[nt] pas (ou plus) aux dark patterns tels que listés plus haut ». Hum, peut-être pas exactement ceux-là, mais…

Voici la fiche d’un article du site.

Cdiscount - fiche produit

Le prix affiché en énorme et en rouge est de 597,56€. Si je le fais remarquer, c’est bien entendu parce que ce n’est pas le véritable prix de cette machine à laver. Pour le connaître, il faut regarder la minuscule ligne de texte gris clair en dessous du prix : « + Eco Part. : 6,00€ soit un total de 603,56€ ». Le véritable prix ne sera indiqué en gros (et seul !) qu’à la dernière étape du fil de commande, au moment du paiement. Surprise !

Voilà donc un dark pattern en or (allez, en argent, le véritable prix est écrit…) dès la fiche produit du site. La bonne nouvelle, c’est qu’il semble que les comparateurs de prix ne se fassent pas avoir. C’est déjà ça.

Au passage, j’ajoute que considérer le layer « alerte infos » (à droite de l’image – très joli en 1024 x 768 !) comme un élément de design persuasif me semble un peu trop gentil. Je l’envisage plus comme un parasitage intrusif et insupportable (laissez-moi lire votre fiche produit !), mais c’est un avis personnel.

Je clique sur le bouton Ajouter au panier. Je suis redirigé sur une page qui me propose des articles complémentaires… derrière un layer « Garantie sérénité ».

Cdiscount - garantie sérénité

Pas de dark pattern ici, la garantie n’a pas été automatiquement ajoutée à mon panier. Sauf que… Le layer présente deux boutons : Refuser la garantie et Continuer mes achats (beaucoup plus contrasté). Et que se passe-t-il si je clique sur le bouton Continuer mes achats ? Le layer se ferme et… la garantie est ajoutée à mon panier. Le voilà, le dark pattern !

Voici donc mon panier :

Cdiscount - panier

La garantie sérénité est bien présente (le site a un certain culot lorsqu’il indique « Avec cet article, vous avez ajouté » : je n’ai rien ajouté du tout…) Je clique donc sur la petite corbeille pour ôter cette garantie indésirable. Le layer suivant s’affiche :

Cdiscount - suppression garantie sérénité

J’ai cliqué sur la corbeille pour virer la garantie, un layer s’ouvre, instinctivement je clique sur le bouton OUI (le plus contrasté, cette fois encore), pensant que c’est le bouton qui me permettra de supprimer ce truc. Erreur : ici aussi il faut bien lire le petit texte, « OUI je souhaite souscrire à la garantie sérénité ». J’ai cliqué sur un bouton de suppression et on me recolle la garantie ? Troisième dark pattern…

Voilà pourquoi je pense qu’il n’est pas correct de prendre Cdiscount en exemple lorsque l’on évoque l’absence de mauvaises pratiques. D’autres sites sont bien plus recommandables à mon avis – le premier qui me vient à l’esprit est materiel.net mais je n’ai pas été vérifier récemment.

PS. Pour les amateurs de layer (JLPS je pense à toi) voici les deux fenêtres qui s’ouvrent lorsque l’on ajoute au panier certains articles, comme une montre connectée par exemple :

Cdiscount - double layer

Les clients qui ont ajouté l’offre « 60 jours pour vous décider » (à droite sur la capture) et qui souhaitent la supprimer une fois arrivés au panier auront droit au layer suivant :

Cdiscount - fautes diverses

J’apprécie tout particulièrement le texte explicatif bien rédigé « Avec 60 JOURS pour vous décider 0 an, […] » et le libellé du bouton, tout simplement incomplet « OUI je souhaite souscrire à ».

Pimkie, une page d’accueil… surprenante

Je découvre sur le site de Mathieu Fauveaux la nouvelle fiche produit du site Pimkie. Curieux, je vais jeter un œil au reste du site.

Voici une copie d’écran de la page d’accueil.

Pimkie.fr - homepage

Autant le dire tout de suite, ma visite s’arrêtera là.

L’inconvénient d’une copie d’écran, c’est que l’on ne voit pas les animations. J’ajoute donc cette mention : le menu « LA COLLECTION », ouvert sur le screenshot ci-dessus, se ferme au bout de quelques secondes.

Je la refais, pour être le plus clair possible : le menu de navigation s’ouvre lorsque j’arrive sur le site et se ferme quelques instants plus tard.

Quel peut être le but de cette animation ? Malheureusement, je n’en vois qu’un seul : les clients ne trouvent pas immédiatement ce qu’ils sont venus chercher sur le site. À ce moment-là, pourquoi, pourquoi ne pas avoir modifié la barre de navigation en y insérant les catégories de produits ?!

L’équipe qui a conçu le site veut manifestement pousser des contenus : blog, jeu concours, looks du moment. Très bien, mais pas à cet endroit ! Les clients s’attendent à trouver les catégories de produits dans la barre de navigation principale, pourquoi y mettre autre chose ?! Point important : ce n’est pas parce que ces contenus figurent à un endroit « chaud » (la barre de navigation principale) qu’ils seront vus par le client.

De mémoire, la barre de navigation principale du site de Pimkie a toujours fonctionné de cette manière. Cette animation à l’ouverture du site me laisse penser que le problème posé par ce choix est connu, alors pourquoi ne pas le résoudre sérieusement plutôt que de chercher des solutions alternatives incongrues, lourdes et peu efficaces ? Cette animation est d’autant plus inutile qu’elle ne concerne que les visiteurs qui passent par la page d’accueil, autant dire certainement pas la majorité.

Bon, voilà pour le point qui m’a le plus marqué sur cette page d’accueil. Cela dit, ce n’est pas la seule chose qui me chagrine, loin de là. Le point suivant est un grand classique du moment : le carrousel.

Pimkie.fr - carrousel en homepage

Je fais court : les slides défilent automatiquement, beaucoup trop vite et en permanence (c’est tellement pénible que j’ai préféré fermer la fenêtre pour rédiger mon article) et le contrôle utilisateur est quasi-inexistant. Confrères concepteurs, je vous renvoie à ces deux articles sur le sujet : 5 big usability mistakes designers make on carousels et Ergonomie des carrousels : 10 principes à respecter. Oh, et à ce bref article de Jakob Nielsen : Auto-Forwarding Carousels and Accordions Annoy Users and Reduce Visibility.

Quant au reste de la page, je fais plus court :

• les textes sont beaucoup trop petits. La barre de navigation principale utilise une police en équivalent 10px, même les liens du footer sont plus grands ! Encore une lecture intéressante (là aussi, on en trouve des milliers sur internet) : 16 pixels for body copy. Anything less is a costly mistake.

• Toujours au sujet de la barre de navigation : les items du menu sont trop proches et peu lisibles. L’ajout de caractères fantaisistes, très tendance bien sûr, n’arrange rien.

• Color forecast : c’est quoi ? Vous connaissez beaucoup de gens qui vont trouver le temps de flâner sur votre site et s’amuser à cliquer sur un lien (joli contraste, au passage) sans savoir ce qui se trouve derrière ?

• Le poids donné aux différents éléments du header me laisse perplexe : l’encart Facebook prend plus de place que les liens « mon compte » et « mon panier » réunis !

• Le faux champ texte d’inscription à la newsletter, en dessous du carrousel, est particulièrement énervant : lorsque je clique dedans pour insérer mon adresse e-mail, une fenêtre s’ouvre et m’impose de remplir un long formulaire (oui, 8 questions pour une simple inscription à la newsletter c’est TRÈS LONG). Pas du tout décourageant.

Pimkie.fr - layer d'inscription à la newsletter

(Il y a même un bouton « Annuler » ! Ça faisait longtemps.)

• L’intégration des encarts sociaux (Facebook, Google+, Youtube, Twitter, n’en jetez plus !) est dégueulasse.

• Plus anecdotique : certaines majuscules ont des accents (NOUVEAUTÉS), d’autre pas (VIDEO, CONNECTES).

• Plus anecdotique mais amusant : on peut faire une recherche sans remplir le champ de recherche.

Bien. Comme je le disais plus haut, ma visite s’arrêtera là.