Modifier le comportement du clic droit, une mauvaise idée ?

Mon estimé confrère Hteumeuleu twittait cette phrase hier :

Et le #darwwwin de la « Mauvaise Idée Au Clic-Droit sur le Logo du Site » est attribué à… https://www.playframework.com/download

Un clic-droit sur le logo du site de Play Framework ouvre en effet une fenêtre modale permettant au visiteur de télécharger les logos de l’entreprise dans différents formats.

Les réactions à ce message (et au suivant) ont été plutôt nombreuses. La réponse la plus fréquente est : pourquoi est-ce une mauvaise idée ?

Je me suis penché sur cette idée il y a un moment. Voici les conclusions auxquelles j’étais arrivé.

– Premier problème : rien n’indique au visiteur ce nouveau comportement, or on le sait : il est mal perçu de modifier le comportement standard du navigateur. Que ceux qui en doutent se remémorent les sites en Flash qui pendant des années ont altéré le comportement du bouton “page précédente” du navigateur.

– Deuxième problème : rien n’indique au visiteur ce nouveau comportement, autrement dit l’affordance de ce comportement est nulle. Je pense cette fois à la personne qui souhaite justement récupérer le logo de l’entreprise : comment peut-elle deviner que tous les logos sont téléchargeables via un clic-droit sur le logo du site ? Le réflexe d’un habitué sera plutôt de chercher une page dédiée sur le site, ou via Google (c’est si facile : Facebook brand, Twitter guidelines…) par exemple.

Quel graphiste pensera faire un clic-droit sur le logo pour le télécharger ? Un logo de moins de 300px de large, que pourrait-il bien en tirer ? Bien entendu, s’il n’a besoin que d’un petit logo un clic-droit enregistrer sous… suffirait, mais dans ce cas… il n’a pas besoin d’un logo en haute définition.

La bonne nouvelle, c’est qu’on peut retrouver le logo via Google Images (en bas de la page 2). La seconde bonne nouvelle, c’est qu’une fois désespéré le graphiste à la recherche du logo risque effectivement de faire un clic-droit sur l’image pour l’enregistrer…

– Troisième problème : les options traditionnelles du clic-droit ne sont plus accessibles. C’est probablement ce qui a le plus gêné mon estimé confrère, et c’est probablement ce qui lui a donné envie d’en parler.

Il serait amusant de connaître et de comparer les deux chiffres :
• le nombre de personnes qui ont fait un clic-droit dans le but de télécharger le logo ;
• le nombre de personnes qui ont fait un clic-droit dans le but de… faire un clic-droit.

– Quatrième problème : il n’est pas possible (à ma connaissance) d’accéder à ces logos via un terminal tactile.

C’est à peu près tout ce qui me vient en tête (les suggestions sont les bienvenues !) J’ajoute pour finir que ce comportement pose peut-être des problèmes d’accessibilité (je ne connais pas ce domaine), et que le choix d’une modale est toujours discutable.

Tous ces problèmes ne sont pas dramatiques. Ce qui est bête, c’est qu’il y a mieux et beaucoup plus simple : pourquoi ne pas faire une page dédiée, comme beaucoup d’autres entreprises ? Cela résout tous les problèmes : pas de modification de comportement, un lien évocateur permet au visiteur de trouver ce qu’il cherche sans souci, les options du clic-droit restent accessibles et la récupération des logos est possible via un terminal mobile. Pourquoi faire compliqué quand on peut faire simple ?

Gmail ne badine pas avec la sécurité

Je dispose comme beaucoup d’internautes de plusieurs « identités » sur internet, chacune associée à un compte de messagerie différent. Il y a quelques jours, j’ai voulu utiliser une vieille adresse Gmail dont je ne m’étais pas servi depuis longtemps. Problème : impossible de retrouver le mot de passe. J’ai donc fait appel au système de récupération de mot de passe de Google.

Je sélectionne le problème que je rencontre, « je ne connais pas mon mot de passe », j’indique l’adresse e-mail concernée et j’appuie sur le bouton Continuer.

Le système me demande de fournir le dernier mot de passe dont je me souvienne. J’ai totalement oublié le mot de passe que j’avais utilisé à l’occasion de la création du compte, je clique donc sur le bouton Je ne sais pas.

Les choses sérieuses commencent, comme semble l’indiquer la barre de progression qui s’affiche à l’écran (une barre de progression pour la récupération d’un mot de passe ?) Le système me réclame une adresse e-mail à laquelle je peux être joint. Je m’exécute et je valide avec le bouton Continuer.

On rentre dans le vif du sujet. Le système me réclame cette fois – et les réponses sont obligatoires :
• la date de ma dernière connexion (sous la forme peu française mois / jour / année) : pas toujours facile de s’en souvenir (impossible dans mon cas) ;
• la date de création du compte ! Sérieusement, il y a beaucoup de gens qui se souviennent de la date de création de leur compte e-mail ?

J’entre des dates très approximatives et je valide.

Cette fois, le système me réclame plusieurs adresses de contacts à qui j’ai fréquemment envoyé des e-mails. Pas trop compliqué pour une personne qui utilise régulièrement son compte. Plus étrange, le système réclame également les noms de quatre libellés au maximum : je vois bien de quoi il s’agit, mais je ne suis vraiment pas certain que ce soit le cas de tous les utilisateurs de Gmail… Pour finir, on me demande la première adresse (il y en a eu plusieurs ?) de récupération de mot de passe dont je me souvienne. Euh…

Google a tout de même prévu un bouton permettant de passer ces questions. Sage décision. Je passe à la suite.

Dans cette dernière étape, le système me demande les noms des autres produits de Google que j’utilise, ainsi que leur date (approximative) de première utilisation.

Quelques remarques au passage :
• Les menus déroulants trop court pour afficher tout le texte, ça ne fait pas très sérieux, ça ne ressemble pas à du Google (ou alors à du Google translate.)
• La gestion des erreurs est à revoir : si par mégarde j’entre un nom de produit mais que je fournis pas de date de première utilisation, le message suivant s’affiche :

Problème, il n’est pas possible de désélectionner le produit Google. La seule façon de procéder, c’est de revenir à la page précédente avec le bouton du navigateur. Pas évident.

Je clique sur le bouton Envoyer, et…

Victoire ! Je vais enfin pouvoir accéder à ma boîte mail !

(Au passage, j’apprécie beaucoup la dernière phrase de cette page. « Si vous n’avez pas reçu d’e-mail de réinitialisation de mot de passe et que votre dossier de spam est vide, essayez d’accéder à votre compte d’une autre manière. » Qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire ?)

Je comprends très bien l’importance de la sécurisation de ce genre de données, et je pense qu’une récupération complexe est vraiment une bonne chose. Pour autant, certaines données réclamées ici (date de création du compte, libellés – heureusement facultatifs, date de première utilisation des autres produits Google…) semblent particulièrement inaccessibles.

L’importance du retour utilisateur (ou feedback direct)

J’ai effectué à l’instant un achat sur le site d’H&M. Sur la fiche produit, le manque de retour utilisateur m’a déconcerté.

l'importance du retour utilisateur - 01 : la fiche produit d'H&M

Je clique ici sur le (minuscule) lien guide des tailles. Voici ce qui s’affiche :

l'importance du retour utilisateur - 02 : affichage du guide des tailles

Manifestement ce layer est vide. J’attends une bonne dizaine de secondes, rien ne se passe. Dans le doute je le ferme puis le rouvre : cette fois, le contenu s’affiche convenablement.

l'importance du retour utilisateur - 03 : affichage OK du guide des tailles

Que s’est-il passé ? Je suppose que le contenu du layer ne s’est pas chargé assez vite. Le problème, c’est que le visiteur n’a aucun moyen de savoir ce qui se trame : pas de barre de chargement, de sablier, de message d’information, etc.

Au niveau de la photo de l’article, on retrouve le même type de comportement désagréable lors du chargement en arrière-plan du visuel “pleine page”.

Lorsque je clique sur une vignette de la colonne de gauche, le visuel s’affiche en grand sur mon écran. Problème : lorsque je clique sur une autre vignette, il ne se passe rien.

l'importance du retour utilisateur - 04 : zoom pleine page

Aucun indice ne me permet de savoir que le visuel se charge en fait en arrière-plan. C’est d’autant plus gênant ici qu’il ne se passe vraiment rien (dans le cas précédent l’ouverture du layer, même vide, représentait tout de même une réponse à mon action.)

Pour finir, même remarque lorsque je clique au centre du visuel de la fiche produit pour l’agrandir : dans un premier temps, le visuel est agrandi… mais dégradé.

l'importance du retour utilisateur - 05 : zoom produit

Aucun élément d’interface n’informe l’utilisateur de ce qui est en train de se passer – ici le chargement en arrière-plan du visuel de bonne qualité qui viendra remplacer l’image dégradée.

J’ai noté un problème similaire sur le site d’Asos, qui propose sur ses pages-listes une fonctionnalité d’aperçu. Lorsque je clique sur le bouton vue rapide, il ne se passe rien.

l'importance du retour utilisateur - 06 : Asos, vue rapide

Bien sûr l’aperçu s’affiche au bout de quelques instants, mais le problème n’est pas là : ce petit temps de latence est très désagréable pour l’utilisateur, qui se demande ce qui se passe, s’il a bien cliqué, etc. L’expérience est inutilement dégradée et manque de fluidité. À l’inverse, une réaction immédiate de l’interface rassure l’utilisateur.

Jean-Claude Grosjean en a fait un point essentiel de sa liste de critères ergonomiques : le feedback direct.

C’est l’art de tenir l’utilisateur, en temps réel, informé de ce qui se passe. Ce critère concerne les réponses du système consécutives aux actions des utilisateurs. Son absence est  source d’incompréhension, parfois déstabilisante selon les contextes. Sa présence est un fort élément de réassurance.

Plus d’informations et d’exemples sur cette page de son site Qualitystreet.