La Poste devrait revoir le texte de ses SMS automatiques

J’ai reçu récemment un SMS m’informant qu’un colis Colissimo était arrivé en point relais. Le voici :

SMS automatique envoyé par La Poste ou tentative de smishing ?

Problème : je n’ai aucune commande en cours. S’agit-il d’un énième SMS de « smishing » (hameçonnage par SMS – je découvre le terme) ? Ça y ressemble beaucoup :

  1. L’expéditeur n’est pas une entreprise, c’est un produit (La Poste est une entreprise, Colissimo est un produit). Les SMS d’hameçonnage ont souvent cette caractéristique : l’expéditeur n’est pas systématiquement une entreprise connue mais un terme qui rappelle une entreprise connue. (Sans compter que le ‘l’ de Colissimo pourrait être un ‘i’ majuscule…)
  2. Le texte commence par le mot d’urgence RAPPEL, un mot écrit en majuscules pour ne rien arranger.
  3. Plusieurs termes utilisés ne sont pas clairs. Le sigle CNI n’est pas connu de tout le monde (par ailleurs, un passeport ou un permis de conduire devraient convenir, donc pourquoi se limiter à la carte d’identité ?), et je ne sais pas ce que c’est qu’un pass – en tout cas pas avant d’avoir cliqué sur le lien fourni…
  4. …un lien qui n’est ni reconnaissable ni proche du nom de l’entreprise ou du produit. Le nom de domaine pkup.fr renvoie même actuellement vers une erreur !
  5. Aucune référence de colis (ou d’expéditeur) n’est fournie.
  6. L’enseigne La Poste n’est même pas mentionnée.

Après « enquête », il s’avère que ce message n’est pas une tentative d’hameçonnage mais bien un SMS officiel de La Poste ; je n’ai aucune commande en cours et c’est normal, c’est un cadeau qui m’a été expédié. Un cadeau à côté duquel j’aurais pu passer à côté à cause d’un SMS plutôt mal conçu.

La Poste pourrait s’inspirer des SMS de sa filiale Chronopost, qui sont un peu plus clairs :

SMS automatique de Chronopost

L’expéditeur est bien l’entreprise Chronopost, on retrouve une référence de colis dans le corps du SMS ainsi qu’une URL bien identifiable. Ce message peut sans doute être amélioré, mais il est tout de même mieux rédigé que celui de La Poste.

L’écriture inclusive au quotidien : rédiger un tweet qui s’adresse à tout le monde

J’ai consulté hier la vidéo Bien concevoir ses composants, les bases d’un design system évolutif de Stéphanie Walter et j’ai ensuite souhaité la partager sur Twitter. J’ai donc tapé ce message :

Chers amis designers, qu’attendez-vous pour regarder un pro au travail ? [lien de la vidéo]

Et puis je me suis rendu compte que je parlais d’ *un* pro alors que Stéphanie est une femme. J’ai modifié mon tweet :

Chers amis designers, qu’attendez-vous pour regarder une pro au travail ? [lien de la vidéo]

Cette histoire de féminin m’a permis de remarquer… que je ne m’adressais qu’à mes amis masculins, ce qui n’était pas mon souhait. J’ai alors modifié mon message une troisième fois :

Cher-e-s ami-e-s designers et designeuses, qu’attendez-vous pour regarder une pro au travail ? [lien de la vidéo]

Cette fois plusieurs choses m’ennuyaient. Le Cher-e-s ne fonctionne pas à cause de l’accent, par exemple. Et puis il me semble que le tiret est assez mal compris par les lecteurs d’écran ; un point médian serait plus adapté, mais je ne sais pas où il se trouve sur mon clavier. Sans parler de la relative lourdeur de la formule designers et designeuses… Je devais trouver autre chose. J’ai modifié une dernière fois mon message :

Collègues du design, qu’attendez-vous pour regarder une pro au travail ? [lien de la vidéo]

Tout cela n’a pris que quelques secondes. J’aurais sans doute pu mieux faire (le Cher s’est un peu perdu en chemin, par exemple) mais mon message ne méritait pas que j’y passe plus de temps.

Pourquoi est-ce que je raconte tout ça ici ? Parce que je trouve que le jeu en valait la chandelle : je suis content d’avoir passé quelques secondes à améliorer mon message pour le rendre plus inclusif – d’ailleurs j’espère qu’à l’avenir je le ferai sans même y prêter attention. Le monde évolue et il me semble indispensable d’embrasser ces changements, en particulier lorsque l’on s’intéresse à l’UX.

Notes

  • Au sujet de l’écriture inclusive, je recommande cet article très complet de Julie Moynat (j’en parlais sur Twitter, justement).
  • Il existe je crois une extension permettant de bloquer l’envoi d’un tweet accompagné d’une image sans texte alternatif. Je me demande s’il existe une extension du même genre permettant de s’assurer que son tweet est bien inclusif.

Edit 23 juillet

@feoche a posé une question très intéressante sur Twitter : comment aurais-je fait s’il n’était pas question d’une femme mais d’une personne non-binaire ? Lawrence Vagner et @Stef Walter lui répondent sur le fil. Je reprends brièvement les suggestions au cas où elles disparaitraient avec le temps :

Lawrence Vagner
Option 3 : Garder une forme neutre « un.e pro »
Option 4 : Me demander comment je préfère être genré.e
Option 5 : Reformuler : « Hey les designers, regardez-donc cette vidéo super intéressante pour créer vos composants, par XXX »

Stef Walter
Quelque chose du genre « Collègues du design, qu’attendez-vous pour regarder la vidéo de Laurence, spécialiste de l’UX design / du domaine » ? (spécialiste est pareil au féminin et masculin du coup plus neutre ?)

Kids Creative Camera, l’appareil photo du diable

Ma fille a reçu un appareil photo numérique pour son anniversaire. Son grand-père a choisi un modèle pour enfant sur le site Cdiscount (mais on peut également le trouver chez Amazon ou Priceminister) et l’a fait livrer directement chez nous.

Le voici :

Appareil photo numérique Kid's cam

Je fais simple : il n’y a RIEN qui va avec cet engin. Si Satan cherchait à concevoir un appareil photo numérique, il ne pourrait probablement pas faire mieux (pire) que ça.

Quelques remarques au sujet de l’objet lui-même dans un premier temps. Cet appareil photo, destiné aux enfants, est livré sans carte mémoire et ne dispose d’aucun système de stockage interne. Autrement dit : si l’acheteur oublie d’ajouter une carte mémoire à sa commande (ce que l’on conçoit sans peine de la part de l’acheteur d’un engin de ce genre), l’enfant ne pourra tout simplement pas utiliser l’appareil lorsqu’il le recevra. On imagine facilement la déception du gamin.

Dans mon cas heureusement (?) pas de problème, je trouve une vieille carte SD au fond d’un tiroir… et je découvre le deuxième point de l’enfer : pour mettre en place la carte mémoire et les piles, il faut enlever deux vis minuscules sous l’appareil.

Trappe de l'appareil

À chaque fois que j’aurai à changer les piles de l’appareil, je devrai utiliser un tournevis ! Une opération pénible d’ailleurs : les vis sont minuscules, le tournevis (fourni !) également… sans parler du cache particulièrement difficile à mettre en place. Point amusant : les vis sont si petites – et donc si facile à perdre – que l’appareil est fourni avec deux vis supplémentaires !

Visserie fournie avec l'appareil

Bref. J’insère les piles et la carte mémoire, je démarre l’appareil… et j’entre dans un nouveau monde de douleur et de confusion.

Il faudrait des heures pour expliquer tout ce qui ne va pas dans le logiciel interne de cet appareil – le problème principal étant justement qu’il ne s’agit pas d’un logiciel conçu spécifiquement pour cet engin mais du logiciel d’un autre appareil photo qu’on lui a collé. Je vais donc lister en vrac les points les plus diaboliques de l’interface.

• L’appareil ne dispose que de cinq boutons : le déclencheur, le bouton d’allumage Power, la croix et les flèches gauche et droite. Ce choix rend l’utilisation de l’appareil extrêmement complexe : pour afficher la photo que l’on vient de prendre par exemple, pas de bouton Play comme partout ailleurs, il faut appuyer sur le bouton Power (pas trop longtemps sinon l’appareil s’éteint, évidemment.) Conséquence logique de ce manque de boutons, la navigation dans le menu (accessible après trois pressions sur le bouton Power) est un CAUCHEMAR.

Menu de l'appareil

– Pour naviguer entre les trois onglets en haut (photo / vidéo / outils), dont les icônes sont positionnées horizontalement, pas question d’utiliser les flèches gauche et droite : il faut utiliser le déclencheur.

– Pour naviguer de haut en bas dans le menu affiché, il faut utiliser les flèches gauche et droite.

– Pour valider un choix ou entrer dans un sous-menu, il ne faut pas utiliser la flèche droite (alors qu’une flèche droite est affichée à l’écran !), il faut utiliser le déclencheur.

– Pour annuler un choix ou revenir en arrière, pas question d’utiliser la croix comme dans tous les menus du monde : elle ne fonctionne pas (elle émet juste un bruit bizarre).

– En bas de l’écran on peut lire les mentions OK : Enter et M : Back. Problème : il n’y a ni bouton OK ni bouton M sur l’appareil.

(J’arrête là, tout lister serait trop long.)

• L’appareil n’a pas de mémoire interne. Autrement dit, tous les paramètres (résolution des photos et des vidéos en particulier) seront perdus à chaque changement de pile. Edit : ce n’est pas aussi simple, apparemment les paramètres sont bien sauvegardés mais s’envolent de temps en temps.

• Par défaut, l’appareil émet des bruits insupportables. Ma préférence va aux sons de pistolet laser émis par les flèches gauche et droite, mais la fanfare futuriste du démarrage vaut aussi le détour. Il est bien entendu possible de les désactiver en passant par le menu : comptez trois ou quatre bonnes minutes pour y arriver. À refaire à chaque changement de piles, évidemment.

Mais ce n’est pas tout… En vrac, l’écran est tellement petit que plusieurs informations ne sont tout simplement pas lisibles (la police de l’horodatage des photos – option activée par défaut – doit être en taille 2 ou 3), le viseur optique cadre n’importe comment (c’est à pleurer de rire, heureusement que personne ne l’utilisera), le mode d’emploi (trois photocopies mal agrafées) est écrit dans un français si mauvais que l’on se demande si une traduction via Google n’aurait pas fait mieux, le mode vidéo ne fonctionne pas correctement (je ne sais pas pourquoi, mais quand je fais dix secondes de vidéo seule les deux ou trois premières sont enregistrées. Peut-être une histoire de mémoire tampon ?)… Quant à la qualité des photos, ma foi… À partir du moment où l’appareil est quasiment inutilisable, est-il vraiment nécessaire d’en parler ? Oh, j’oubliais, trois fois rien : en redémarrant l’appareil à l’instant j’ai perdu l’intégralité des photos que j’avais prises pour le test. Voilà.

Notice de l'appareil

Cet objet représente tout ce que le monde actuel fait de pire. Il n’est pas seulement inutile, c’est un énorme gâchis de matière et d’énergie. Pour tout dire je ne sais même pas quoi en faire : le donner ? Mais je ne souhaite à personne d’utiliser un truc pareil ! Le jeter ? Il est neuf ! (Je ne peux malheureusement pas le faire reprendre par le site marchand.) Alors si quelqu’un a une idée…