L’écriture inclusive au quotidien : rédiger un tweet qui s’adresse à tout le monde

J’ai consulté hier la vidéo Bien concevoir ses composants, les bases d’un design system évolutif de Stéphanie Walter et j’ai ensuite souhaité la partager sur Twitter. J’ai donc tapé ce message :

Chers amis designers, qu’attendez-vous pour regarder un pro au travail ? [lien de la vidéo]

Et puis je me suis rendu compte que je parlais d’ *un* pro alors que Stéphanie est une femme. J’ai modifié mon tweet :

Chers amis designers, qu’attendez-vous pour regarder une pro au travail ? [lien de la vidéo]

Cette histoire de féminin m’a permis de remarquer… que je ne m’adressais qu’à mes amis masculins, ce qui n’était pas mon souhait. J’ai alors modifié mon message une troisième fois :

Cher-e-s ami-e-s designers et designeuses, qu’attendez-vous pour regarder une pro au travail ? [lien de la vidéo]

Cette fois plusieurs choses m’ennuyaient. Le Cher-e-s ne fonctionne pas à cause de l’accent, par exemple. Et puis il me semble que le tiret est assez mal compris par les lecteurs d’écran ; un point médian serait plus adapté, mais je ne sais pas où il se trouve sur mon clavier. Sans parler de la relative lourdeur de la formule designers et designeuses… Je devais trouver autre chose. J’ai modifié une dernière fois mon message :

Collègues du design, qu’attendez-vous pour regarder une pro au travail ? [lien de la vidéo]

Tout cela n’a pris que quelques secondes. J’aurais sans doute pu mieux faire (le Cher s’est un peu perdu en chemin, par exemple) mais mon message ne méritait pas que j’y passe plus de temps.

Pourquoi est-ce que je raconte tout ça ici ? Parce que je trouve que le jeu en valait la chandelle : je suis content d’avoir passé quelques secondes à améliorer mon message pour le rendre plus inclusif – d’ailleurs j’espère qu’à l’avenir je le ferai sans même y prêter attention. Le monde évolue et il me semble indispensable d’embrasser ces changements, en particulier lorsque l’on s’intéresse à l’UX.

Notes

  • Au sujet de l’écriture inclusive, je recommande cet article très complet de Julie Moynat (j’en parlais sur Twitter, justement).
  • Il existe je crois une extension permettant de bloquer l’envoi d’un tweet accompagné d’une image sans texte alternatif. Je me demande s’il existe une extension du même genre permettant de s’assurer que son tweet est bien inclusif.

Edit 23 juillet

@feoche a posé une question très intéressante sur Twitter : comment aurais-je fait s’il n’était pas question d’une femme mais d’une personne non-binaire ? Lawrence Vagner et @Stef Walter lui répondent sur le fil. Je reprends brièvement les suggestions au cas où elles disparaitraient avec le temps :

Lawrence Vagner
Option 3 : Garder une forme neutre « un.e pro »
Option 4 : Me demander comment je préfère être genré.e
Option 5 : Reformuler : « Hey les designers, regardez-donc cette vidéo super intéressante pour créer vos composants, par XXX »

Stef Walter
Quelque chose du genre « Collègues du design, qu’attendez-vous pour regarder la vidéo de Laurence, spécialiste de l’UX design / du domaine » ? (spécialiste est pareil au féminin et masculin du coup plus neutre ?)

2 réponses sur “L’écriture inclusive au quotidien : rédiger un tweet qui s’adresse à tout le monde”

  1. Le premier changement était nécessaire c’est certain.
    L’utilisation de points médians, tirets etc est une horreur à lire (pour moi).
    La dernière formule est bien et tant mieux si ça te satisfait : c’est ton écrit, il est nécessaire qu’il te satisfasse.

    Mais bon sang… suis-je le seul à ne pas prendre une tournure au masculin comme étant nécessairement exclusive mais être une forme neutre ?

    Certes le français a cette ambiguïté entre le masculin et le neutre, mais pourquoi est-ce à l’auteur de devoir se tracasser à ce point avec l’écriture inclusive alors que le réel problème est juste dans la tête du lecteur qui **veut** y voir une exclusion ?

    Je viens d’utiliser «auteur» et «lecteur» au masculin sans qu’en aucun cas je n’imagine le genre de l’un ou de l’autre. Je trouve véritablement tordu d’interpréter cette phrase comme étant exclusive, c’est tout simplement «prendre les mots au pied de la lettre» sans faire preuve de discernement !

  2. Bonjour,

    Merci de ton commentaire ! Dans mon cas le « problème » n’était justement pas du côté du lectorat (note : j’avais mis « des lecteurs », et puis j’ai modifié !) puisque c’est moi qui me suis repris. Et mon but n’était pas spécialement de satisfaire mon lectorat, mon but était de parler à tout le monde (mais en parlant à tout le monde, est-ce que je ne satisfais pas mon lectorat ?) C’est une démarche que j’ai choisi de m’imposer ; je la trouve intéressante donc j’en parle ici.

    Je comprends ton point de vue : en français on nous apprend que le masculin l’emporte sur le féminin, donc mon « Chers amis » englobe les hommes et les femmes. C’est grammaticalement correct, pas de souci à ce niveau. C’est plus un choix idéologique : je peux faire comme d’habitude sans me poser de question (ça marche, c’est valide), ou je peux tenter de faire autrement et prendre en compte les changements qui s’opèrent dans la société en ce moment, des changements que je comprends et qui m’interpèlent.

    Je trouve les discussions actuelles autour de l’écriture très intéressantes et j’ai envie de tenter des choses, de voir plus large. J’aime le sens dans lequel elles vont.

    Pour finir, c’est aussi une question de point de vue : je ne le vis pas comme une contrainte, je le vis comme une opportunité.

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