Bershka a un site e-commerce… mais ne veut pas que ça se sache

On m’a indiqué il y a quelques jours que plusieurs enseignes d’Inditex (la maison mère de Zara) disposaient désormais d’un site marchand. J’ai jeté un œil à celui de Bershka.

La construction de la page d’accueil est très surprenante : le menu supérieur ne contient aucun lien permettant un accès direct aux produits du site. À la place des traditionnelles boutiques (femme, homme, enfant…) et/ou catégories de produits (pantalons, chaussures, accessoires…), on trouve une liste de mots assez obscurs pour le néophyte (« lookbook » je connais, « campagne »… peut-être les visuels d’une campagne d’affichage ? Quant à B-Scene, je sèche).

Je suppose qu’il s’agit d’un choix de l’équipe de production : présenter son site de façon « aspirationnelle » (pardon) plutôt que conventionnelle. Peut-être pour se distinguer, peut-être pour renforcer le côté « tendance » de la marque (je ne connais pas très bien l’enseigne)…

Ce choix a de fortes chances de perturber la cliente : celle-ci risque de passer plus de temps à chercher les produits qui l’intéressent, voire de quitter le site avant d’avoir trouvé quoi que ce soit. En terme d’ergonomie web, faire fi des conventions est rarement une bonne idée. Je note d’ailleurs que cette construction n’est pas la seule fantaisie du site (cf. l’emplacement du moteur de recherche).

Ce choix a de nombreuses conséquences sur le reste de la page d’accueil – et du site plus généralement. Le menu supérieur ne permet pas de comprendre que l’on se trouve sur un site e-commerce (la présence du panier aurait pu aider, malheureusement sa visibilité est bien trop faible ; quant à son libellé, c’est un exemple de traduction fantasque), l’équipe de production doit donc imaginer des moyens de renforcer le côté « marchand » de la boutique.

Tous les boutons du menu inférieur (en bleu ciel), qui contient les liens traditionnellement situés dans le menu supérieur (femme, homme…), se voient ainsi agrémentés de l’expression « Achetez maintenant ». Un menu « boutique online » (difficile à identifier comme tel) fait également son apparition en haut à droite de la page. Quant au carrousel principal, les liens qu’il contient ne renvoient pas vers des sélections de produits « Country life » ou « Dark attitude » comme on pourrait s’y attendre mais simplement vers les boutiques « femme », « homme » etc.

Bershka - des éléments qui rappellent qu'il s'agit d'un site e-commerce

Je clique sur « Lookbook ». Je suis redirigé sur une page très élégante… dépourvue de menu inférieur. C’est à ce moment-là que l’on comprend mieux l’importance du menu « boutique online » en haut à droite : c’est ici le seul élément permettant d’accéder aux traditionnelles pages produits. Étrangement, ce menu n’utilise pas exactement les mêmes libellés que le menu inférieur de la page d’accueil (le terme « Bershka » remplace le terme « femme »).

Je clique sur « Hommes ». Je suis redirigé sur une page plus classique qui présente toutes les catégories de produits. Un menu latéral remplace cette fois le menu inférieur de la page d’accueil, mais ne contient pas tout à fait les mêmes éléments (le lien « Accésoires » – avec les fautes – se substitue au lien « dernière semaine »).

Bershka - Boutique homme

J’utilise le menu « boutique online » pour rejoindre la page « dernière semaine » : le menu de navigation principal ne se trouve désormais plus en bas ou à gauche, mais en haut !

Sur les 4 pages que j’ai visitées, j’ai donc trouvé 5 façons différentes d’accéder aux mêmes boutiques. 5 menus situés à des emplacements différents, c’est 5 fois plus de chances de perdre le visiteur (un raccourci un peu simpliste mais assez éloquent). L’utilisation d’un menu supérieur unique plus traditionnel permettrait à la cliente de se concentrer sur le contenu du site plutôt que sur sa structure.

Bonus

Quand je saisis l’adresse www.bershka.fr dans mon navigateur, je ne suis pas redirigé sur le site e-commerce français mais sur une page me permettant de sélectionner mon pays.

Bershka - choix du pays

Vous connaissez beaucoup de gens qui tapent www.bershka.fr pour se rendre sur le site italien ? Plus pénible encore, après la page de choix du pays, Bershka me demande de sélectionner ma langue.

Bershka - choix de la langue

Il y a beaucoup d’anglophones en France ?

Note : si je vais sur google.fr et que je tape « Bershka », le premier lien me renvoie également sur ces 2 pages intermédiaires (la première fois, ensuite les choix sont gardés en mémoire). Ce n’est qu’en sélectionnant « pages en français » dans les paramètres du moteur de recherche que je pourrai éviter ces pages.

Lemonde.fr : une gestion des liens très confuse

Les articles des sites d’actualités sont fréquemment assortis de liens permettant aux visiteurs d’approfondir le sujet. Sur le site du Monde ces liens sont en bleus, ce qui les distingue bien du corps du texte noir. Ils passent au rouge et sont soulignés en rollover.

LeMonde.fr - liens en bleu, rollover en rouge

En revanche, ces liens ne changent pas de couleur lorsqu’ils ont déjà été visités. C’est un point régulièrement soulevé par certains experts : dans son livre « Site web : priorité à la simplicité », paru en 2006, Jakob Nielsen parle d’un « problème d’utilisabilité à fort impact ».

Dans les grandes lignes, ce comportement permet entre autres aux utilisateurs :
• de ne pas perdre de temps à consulter les mêmes liens de manière non intentionnelle ;
• de revisiter certains liens intéressants.
L’article détaillé se trouve ici. (1)

Sur le site du Monde, il y a plus gênant. En marge des liens bleus évoqués précédemment, on trouve de-ci de-là des « textes cliquables » (j’utilise cette expression pour les distinguer) qui se fondent dans le corps de l’article et qu’il est quasiment impossible de discerner. Sur l’image ci-dessous, les 2 paragraphes visibles ne contiennent pas 2 mais… 8 liens.
Note : l’article est actuellement consultable à cette adresse.

LeMonde.fr - liens cachés

J’ai isolé 2 types de textes cliquables :
les verbes employés à l’infinitif (« engager », « révoquer », « engager » à nouveau, « agir ») renvoient vers le site http://conjugaison.lemonde.fr ;

LeMonde.fr - page de conjugaison

certains noms propres (« François-Marie Banier », « Jean-René Farthouat ») redirigent le lecteur sur un genre de  SERP (acronyme de Search Engine Result Page, page de résultat de recherche). Certains, mais pas tous ! (Le texte « Liliane Bettencourt » n’est pas un lien par exemple.) Par ailleurs, seule la première itération de ces noms propres est cliquable, les suivantes ne le sont pas.

LeMonde.fr - fausse page de résultats de recherche

Pour savoir que ces textes sont cliquables, il faut passer son curseur dessus : après une seconde de survol (sans bouger !), le pointeur de la souris se transforme en main et le texte se souligne. J’ai testé le site sur PC (Internet Explorer 8, Firefox 3.6) et Mac (Safari 5, Firefox 7), le comportement est le même partout.

Question : pourquoi traiter ces liens de cette manière ? Si on estime qu’ils présentent de l’intérêt pour le lecteur, pourquoi ne pas les mettre en valeur ? Si après réflexion on les considère comme peu appropriés, pourquoi ne pas les supprimer ?

Dans l’état actuel des choses, la plupart des visiteurs risquent de passer à côté.

(1) Je suis d’ailleurs assez ennuyé que mon propre site ne suive pas cette recommandation. Ma connaissance de WordPress est encore un peu limitée…

Twitter, OVH : la force d’un réseau social

Il y a deux semaines, au cours de manipulations que je croyais effectuer sur mon site de test, j’ai supprimé mon blog par erreur. J’ai immédiatement contacté le support de mon hébergeur (par téléphone et via l’interface web dédiée), OVH, pour obtenir de l’aide. J’ai ensuite été confronté à une situation pénible : le manque de retour du service technique.

J’explique mon problème au support par téléphone une heure après ma maladresse. J’obtiens rapidement une première réponse par mail (vers 20h30, très fort !) qui me permet de récupérer mes fichiers, mais pas ma base de données. Le site reste donc inaccessible. J’envoie un message au support en expliquant ce nouveau souci, et c’est là que l’attente a commencé.

Il a fallu environ 36h au support pour me recontacter. Une journée et demi sans savoir si l’on va perdre ou non 4 mois de travail, c’est long. Surtout quand au bout de 36h, la réponse du support ne fait pas avancer les choses. L’interface web me propose de changer d’interlocuteur (une fonctionnalité très intéressante) : j’accepte, mais bizarrement c’est la même personne qui me recontactera un peu plus tard pour m’expliquer d’où vient le problème selon lui. Cette fois encore, son intervention ne m’éclairera pas.

Je tente de trouver de l’aide ailleurs. J’expose mon problème en détail sur le forum d’OVH. Un membre (que je remercie à nouveau) me propose de me contacter par téléphone pour essayer de m’aider (une démarche que je trouve toujours épatante !) Après 45 minutes d’échange, il semble que le problème ne puisse pas être résolu sans passer par le support technique, qui ne répond plus à mes messages.

Un peu énervé par ce manque de communication (j’ai des sauvegardes de ma base de données, mais je n’ose pas toucher au site de peur d’interférer avec une intervention en cours), je tweete mon souci à quelques amis followers (14 personnes à l’heure actuelle, pas de quoi faire trembler des montagnes).

Surprise : quelques minutes plus tard, je reçois un mail d’un nouvel intervenant du support (Steve) qui m’explique clairement d’où vient le problème et comment faire pour le résoudre ensemble. 3 heures et quelques échanges plus tard, mon blog était à nouveau en ligne.

Après plusieurs jours de galère, cette soudaine réactivité m’a étonné. Ce n’est que le jour suivant, en consultant mon compte Twitter (je ne suis pas un utilisateur très régulier), que je comprendrai ce qui s’est passé : la veille, 2 personnes d’OVH avaient répondu à mon tweet (tonyovhcom et olesovhcom, directeur général d’OVH). Je suppose que le message est ensuite passé en interne.

Au final j’ai passé une semaine un peu difficile, à attendre des retours du support qui n’arrivaient pas. Un simple message « nous cherchons une solution à votre problème, nous vous recontacterons dès que possible » aurait suffi à m’apaiser, malheureusement mon premier interlocuteur ne m’a pas tenu informé de ses travaux en cours. Mon message sur Twitter a vraisemblablement fait avancer les choses de manière efficace (et inattendue !), et le talent de Steve m’a sorti d’une galère franchement déplaisante. Je salue donc la prestation (aussi bien technique que « relationnelle ») de mon interlocuteur, ainsi que l’aide providentielle de Twitter !