Chaque vendredi je me rends à la piscine pour faire quelques longueurs. Chaque vendredi j’entre dans le vestiaire des hommes, je saisis un portant et je me glisse dans une cabine pour me changer. Chaque vendredi, invariablement, je maudis le concepteur de cet objet.
Qui a pu créer ce portant ? Plus important : à qui le destinait-il ? Je vais tenter de répondre à cette seconde question.
Premier point : les crochets. Lorsque j’ai découvert le portant de piscine il y a bien longtemps, on m’a expliqué que ces deux crochets servaient à suspendre ses chaussures, comme ceci :
Bon, ça ne tient pas très bien mais ça fonctionne. Problème : si je glisse mon jeans sur la barre située au dessus, il vient se positionner directement sur les semelles de mes chaussures.
Afin d’éviter de salir mon pantalon avec mes semelles, je décide donc de ranger ma paire de chaussures dans le petit panier du fond. Ça fonctionne plutôt bien.
Problème : si vous portez des bottes, il faudra trouver une autre solution.
Et vous pouvez toujours essayer de les suspendre aux crochets… Le concepteur de ce portant ne le destinait manifestement pas aux femmes qui portent des bottes.
Pour le t-shirt c’est assez simple, il suffit de le positionner sur le portant comme sur un cintre. La manœuvre peut en revanche s’avérer un peu pénible étant donné la taille de certaines cabines. Mieux vaut être souple.
Souple… et pas trop grand : lorsque je place un t-shirt taille L sur le portant, il traine par terre dans ma cabine (et par terre, dans une cabine de piscine, ce n’est pas un endroit très propre). Pas question de ranger « ce qui dépasse » dans le petit panier : il contient mes chaussures, et donc mes semelles sales.
Je peux toujours plier mon grand t-shirt et le glisser sur la barre, avec le jeans, mais il sera bien compliqué de faire rentrer un t-shirt, un jeans et un pull dans ce petit espace.
J’ajoute qu’il n’est pas non plus conseillé d’arriver avec un long manteau, qui dépassera bien plus qu’un t-shirt taille L.
Si je résume, les utilisateurs de ce portant sont priés :
• de ne pas porter de longs manteaux ;
• de ne pas mesurer plus de 1,75m (taille M) ;
• de se débrouiller pour bien positionner leurs vêtements ;
• de ne pas porter de chaussures encombrantes (bottes ou autres).
D’une certaine manière, le plus simple c’est de s’habiller en conséquence : je vais à la piscine donc je pense à prendre un petit blouson et une paire de basket plutôt qu’un manteau et des bottes. Mais ne serait-ce pas plutôt à l’objet d’être adapté aux besoins des utilisateurs ? Je ne peux pas toujours choisir mes vêtements avant d’aller à la piscine, par exemple si je m’y rends entre 12h et 14h un jour de semaine, ou juste après le boulot. Sélectionner mes vêtements en fonction de ce portant, n’est-ce pas poser le problème à l’envers ? Malheureusement, l’utilisateur n’a pas le choix.
Pour finir, j’accroche le sac qui contenait mes affaires de piscine au portant. Déséquilibré, ce dernier tombe en arrière. Avec un peu de chance seul le sac touchera le sol de la cabine…
Oh j’ai bien essayé de contourner le problème du portant, par exemple en rangeant tous mes vêtements dans mon sac. Malheureusement, le personnel de la piscine a refusé de prendre mes affaires, « à cause de vigipirate. Votre sac doit contenir le moins de vêtements possible ». Ah, bon.
Que conclure de cette expérience ? Qu’il est plus simple de faire du jogging que d’aller à la piscine ? C’est sûr, mais c’est moins bon pour le dos. Plus sérieusement, ce portant n’est qu’un exemple d’objet du quotidien qui mériterait d’être revu. Ils sont nombreux : rien qu’en tournant la tête, dans mon bureau, je compte au moins 5, 6, 7 (etc.) objets qui gagneraient à être retravaillés : Freebox aux commandes illisibles et dont le boîtier prend bêtement la poussière, téléphone aux touches mal conçues, lampe articulée mal articulée (!)… Et bien sûr, si j’en parle sur ce blog, c’est que cette remarque est valable sur un nombre incalculable de sites internet. Des sites conçus par on-ne-sait-qui qui ont oublié à qui ils étaient destinés.
* On m’indique en commentaire qu’il s’agit d’un « valet » de piscine et pas d’un « portant », nom que j’ai utilisé dans l’article.
Ne serait-ce pas un valet, le nom que tu cherches ?
Oui je pense bien, merci ! (J’hésitais entre les deux.)
Je vais mettre à jour le titre de l’article.
L’ergonomie touche tous les objets du quotidien. C’est un exemple très concret et parlant de ce que l’ergonome peut apporter lors de la conception ou l’amélioration d’un produit (ou d’un service).
Il faudrait vraiment que certains pensent davantage à l’utilisateur quand ils travaillent sur un objet (ou sur un site Internet).
Excellent exemple.
Cependant un exemple de quoi ?
Avant d’accabler le « concepteur », il faudrait se retourner sur le cahier des charges du client.
Ce dernier fait probablement moins d’un page, prétextant que « Tout le monde est déjà allé à la piscine », ou d’autres évidences triviales…
Comme je le dis à la fin de l’article, c’est un exemple « d’objet du quotidien qui mériterait d’être revu ».
Il n’est pas possible de connaître les éléments qui ont conduit à la création de ce valet : le cahier des charges a peut-être été bâclé, le budget était peut-être dérisoire, c’est impossible à dire. Je me suis donc concentré sur l’aspect « expérience utilisateur », soit la partie la plus accessible.
Bonjour,
En lisant votre article, je me dis que vous êtes parti dans la mauvaise direction (mauvaise présentation de l’objet). Je ne suis pas familier de ce genre d’objet et je propose les hypothèses suivantes :
1. Ce valet est destiner aux enfants. Cela pourrait expliquer les problèmes de longueur.
2. Ce valet est supposé être accroché (sinon pourquoi un crochet). Cela résoudrai également les problème de longueur
3. Les 2 crochets sont à utiliser pour 1) votre sac et 2) vos ceintures/écharpes. Cela évite le problème d’hygiène avec le pantalon.
4. Le bac est pour les chaussures. Leurs poids donne de la stabilité à l’ensemble (en rabaissant le centre de gravité).
Les hypothèses ne sont pas mutuellement exclusives.
Bonjour,
Je crains que ces hypothèses ne collent pas davantage. Si je reprends dans l’ordre :
1. il n’y a qu’un seul type de valet pour tout le monde. Il ne doit donc pas s’agir d’un modèle « enfant ».
2. Il est impossible de l’accrocher dans une cabine, la petite patère (souvent manquante) ne le permet pas.
3. Glisser un sac sur l’un de ces deux crochets est une prouesse lorsque des vêtements sont placés sur la barre située au dessus. Il n’y a que très peu de place. En revanche, ils peuvent effectivement convenir pour une écharpe (qu’il faudra plier pour éviter qu’elle ne traine par terre, cf. problème de longueur).
4. Comme je le montre dans l’article, le bac peut être utilisé pour des chaussures… de petite taille. Si vous portez des bottes par exemple, ce ne sera pas possible.
Tout à fait d’accord avec cette analyse et je rajouterais à ça, le casier à clef ou code qui lui supporte mal le valet + le sac à dos…
Bonjour
Sans parler du côté ergonomique, j’adore cet objet. Le vendriez-vous ?
Merci
Ah non désolé, je l’ai emprunté à la piscine pour faire quelques photos. :)